En tant que Head of Climate Action, Jeroen De Smet est responsable de la stratégie de durabilité écologique qui vise à rendre Upgrade Estate neutre en carbone à l’horizon 2035. Robbe Fioen est ingénieur technicien chez Upgrade Estate. Pour Upoffiz Loop5, il a collaboré avec le bureau d’études Boydens sur le concept d’énergie spécial qui y a été mis en œuvre.
Upgrade Estate veut être neutre en carbone en 2035. Qu’est-ce que cela signifie exactement ?
JEROEN: La loi européenne sur le climat (le Pacte vert) stipule avant tout que chaque organisation doit être neutre en carbone d’ici 2050. Nous voulons parvenir au zéro d’ici 2035. La stratégie consiste à réduire au maximum les émissions de CO2 dans un premier temps. Nous pouvons compenser le reste en captant du CO2 grâce à une gestion durable des forêts et, comme ici sur le site d’Upoffiz Loop5, en utilisant également le bois comme alternative au béton et à l’acier, deux matériaux à fortes émissions de CO2.
Comment ce projet contribue-t-il à cet objectif ?
JEROEN: Pour une organisation neutre en carbone, nous parlons en réalité de 3 niveaux. Le premier niveau consiste à limiter les émissions directes, notamment l’utilisation de chaudières à gaz. Dans ce projet, ce premier niveau n’existe pas, car il s’agit d’un bâtiment sans gaz. Aucun combustible fossile n’est utilisé, donc aucun CO2 n’est libéré. Le deuxième niveau concerne les émissions indirectes qui sont nécessaires pour que le bâtiment soit opérationnel, comme l’électricité qui n’est pas produite sur le site. Il s’agit de l’électricité fournie par un fournisseur d’énergie à partir d’une centrale nucléaire, d’une centrale au gaz, d’une centrale hydroélectrique ou d’un mélange d’énergie renouvelable et non renouvelable. Pour ce site, nous utilisons autant que possible les variantes renouvelables. Le niveau 3 concerne tout le CO2 qui est produit pendant le processus de construction. Nous recensons ces émissions en nous basant sur le cycle de vie intégral d’un projet ou d’un site de construction et sur l’hypothèse d’une durée de vie de 100 ans. Nous avons développé un outil à cet effet. Au sein de l’équipe Climate Action, notre collègue Anton est responsable de l’examen de tous nos fournisseurs et de leurs produits. Cet examen de leur fonctionnement et des produits avec lesquels ils travaillent nous en apprend beaucoup sur leur durabilité sociale et économique. En plus de cette réflexion éthique, Anton travaille aussi avec de nombreux départements pour évaluer les collaborations avec les fournisseurs et les partenaires.
ROBBE: L’enveloppe extérieure des bâtiments de ce site est construite de façon classique, avec du béton comme matériau de base. Mais si vous faites un tour à l’intérieur des bâtiments, vous remarquerez que presque tous les matériaux classiques ont été remplacés par du bois. Ici, dans les salles de réunion partagées, mais aussi dans la salle de théâtre, The Plectrum, où toute la tribune est une structure en bois. Nous avons pris les devants et économisé beaucoup de CO2. Nos futurs projets seront de plus en plus conçus en bois, dans l’intention de créer des constructions carbonégatives.
JEROEN: Nous avons procédé à de nombreuses recherches préliminaires et avons finalement opté pour le bois lamellé-croisé. Mais il existe différentes manières de construire en bois. Nous expérimentons sans cesse. Par exemple, nous testons actuellement l’OSB4 comme solution alternative pour ériger l’enveloppe extérieure. Pour l’intérieur, tout le mérite revient d’ailleurs à l’équipe Look & Feel. Elle s’est fixé pour objectif d’utiliser 75 % de matériaux de seconde main. Tous les meubles que vous trouvez ici sont des meubles d’occasion. Pour l’aménagement extérieur, 13 000 plantes, 150 arbres et une centaine d’arbustes ont été plantés. Avec le temps, ils auront un impact, sachant que chaque mètre cube d’arbres élimine une tonne de CO2 de l’air. Et surtout, ils apportent également de la sérénité. Leur influence positive sur le bien-être mental des personnes ici ne doit pas être sous-estimée.
Nos futurs projets seront de plus en plus conçus en bois, dans l’intention de créer des constructions carbonégatives.
- Robbe
Le principe STOEP a fait l’objet d’une grande attention et de beaucoup de questions. Pouvez-vous expliquer brièvement de quoi il s’agit ? Comment a-t-il été appliqué ici ?
JEROEN: Le principe STOEP est un concept de mobilité flamand dans lequel le S représente Stappen, ou la marche ; le T, Trappen, ou les escaliers/le vélo ; le O, Openbaar vervoer, ou les transports en commun ; et le P, Parkeren, ou stationnement. Le E avant le P signifie électrique. Cela reflète nos priorités en termes de mobilité. Le piéton est roi et les usagers qui viennent en voiture électrique pourront la recharger à l’une des 100 bornes de recharge installées.
Avec Limoengroen, comment avez-vous répondu aux défis de mobilité actuels ?
JEROEN: Auparavant, le site du Loop n’était pas toujours facile d’accès. Aujourd’hui, il y a eu beaucoup d’améliorations. Il existe de nombreuses possibilités pour accéder au site à vélo ou en trottinette électrique. Sur les mille places de parking prévues, cinq cents sont réservées à la mobilité « douce » et cinq cents à la mobilité « dure ». Nous nous sommes proportionnellement et principalement concentrés sur la mobilité douce, les vélos normaux. Mais il est également possible de recharger des vélos et des trottinettes électriques sur le site. Des vélos partagés sont également disponibles. Les installations qui sont en phase avec cette mobilité douce ne sont pas négligeables. Nous avons aménagé 12 douches agréables pour les employés qui viennent à vélo et qui veulent entamer leur journée de travail frais et dispos après leur trajet matinal. Pour ceux qui viennent en voiture, il y a un peu plus de 500 places de parking, dont 100 équipées d’une borne de recharge électrique. Cela représente 20 % des places, un ratio adapté à l’avenir. Nous en sommes très fiers.
Le concept d’énergie renouvelable est spécial, pouvez-vous l’expliquer ? Il semble relativement compliqué de chauffer un tel site sans chaudière à gaz.
ROBBE: Sous les fondations, il y a 100 trous qui atteignent jusqu’à 150 mètres de profondeur. C’est ce que l’on appelle un champ BTES, l’acronyme de « Borehole Thermal Energy Storage » (stockage d’énergie thermique par forage). Dans ces trous de forage sont installés des tubes à travers lesquels l’eau s’écoule. En hiver, le sol a une température donnée et nous allons utiliser ce système pour extraire la chaleur du sol, ce qui fait qu’il se refroidit. Le grand avantage de ce système est qu’il nous permet de renvoyer la chaleur dans le sol en été. Le sol est donc à la fois la source de chauffage et de refroidissement de nos bâtiments, via un échangeur de chaleur. Le site se compose de bureaux et d’appartements. Un bureau a principalement besoin de refroidissement au cours de l’année. Il abrite en effet de nombreux ordinateurs et de nombreuses personnes, nous voulons donc rafraîchir ces bâtiments tout l’été. En revanche, un appartement a principalement besoin de chauffage. Les besoins en refroidissement sont moindres, en particulier avec l’isolation et le vitrage que nous avons utilisés. Cela signifie que le site, considéré dans sa globalité, ne nécessite pas une quantité extrême d’énergie pour être opérationnel. La combinaison de différents types de bâtiments est très avantageuse à cet égard.
Upgrade Estate est un pionnier en matière d’énergies renouvelables. Avez-vous intégré d’autres technologies innovantes dans Loop5 ?
ROBBE: Nous nous sommes interrogés sur la manière de fournir à la fois le chauffage et le refroidissement aux utilisateurs. Comme nous l’avons mentionné précédemment, il s’agit d’un bâtiment en béton. Nous avons également opté pour le principe d’activation du noyau de béton. De quoi s’agit-il ? En bref, il s’agit d’un type de chauffage par le sol dans lequel les tuyaux ne sont pas installés dans la structure du sol ou la chape, mais dans la dalle de béton même (et les plafonds). De l’eau chaude y circule en hiver et de l’eau froide en été. C’est un système très stable, qui résiste bien aux importantes fluctuations de la température extérieure. Nous sommes en mesure de maintenir une température adéquate dans l’ensemble du bâtiment avec une température d’eau de 30 degrés. Un système de chauffage au gaz classique, par exemple, nécessite une chaleur de 75 degrés. La combinaison de tous ces facteurs nous permet de chauffer et de refroidir un très grand site avec une puissance relativement limitée, sans gaz. En plus d’utiliser toutes ces techniques, nous testons également de nouvelles applications de R&D sur ce site.
JEROEN: Vous avez les techniques sur le site, le matériel, mais le logiciel est lui aussi vraiment impressionnant. Le système de gestion du bâtiment qui a été mis en place contient tellement de données et est capable d’intervenir sur tant de points qu’il nous donnera énormément d’informations. Nous pouvons ainsi distribuer toute la chaleur produite très efficacement sur une partie des bâtiments. Par exemple, lorsque les gens arrivent au bureau et qu’il fait un peu trop froid à ce moment-là, nous pouvons y envoyer toute notre énergie. Nous pouvons mieux anticiper les demandes spécifiques, mais aussi adapter notre système aux conditions météorologiques. Les derniers jours ont été très chauds, nous allons donc refroidir et inversement. Nous possédons également notre propre station météorologique afin de mieux réagir aux circonstances.
Il y a des rumeurs selon lesquelles 75 % de l’énergie de Loop5 est générée par Limoengroen. Est-ce correct et comment allez-vous y parvenir ?
JEROEN: Nous sommes sur le site du Loop, plus précisément sur le champ 5. Plus vers l’autoroute, nous allons bientôt développer trois champs avec des panneaux solaires, 12 000 pour être exact. C’est un nombre gigantesque. Ces terrains doivent être développés davantage, mais les longues périodes de permis et les délais d’exécution nous donnent la possibilité de construire une ferme solaire pendant 10 ans. Nous avons également été autorisés à relier les 3 champs à ce site via un forage souterrain. C’est unique en Belgique. Il s’agit d’énergie solaire naturelle et renouvelable. Pour pouvoir capter cette énergie, nous installerons également une grande batterie dans un conteneur maritime. C’est aussi de la R&D.
Nous allons bientôt développer trois champs avec des panneaux solaires, 12 000 pour être exact. Ces champs seront connectés à Loop5.
- Jeroen
Upkot et Upliving ont des poules pour traiter les déchets organiques des locataires. En avez-vous aussi prévu sur ce site ?
JEROEN: Leur place est déjà prévue au pavillon Pegula, à proximité du laboratoire de Proef. Peut-être qu’elles pourront y goûter les restes de nouveaux plats ? (rires) Il y aura donc un poulailler Upoffiz. Le concept de déchets sur le site a lui aussi été mûrement réfléchi, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des bâtiments, et tant au niveau individuel que collectif. Il existe différents locaux pour les différentes fractions de déchets, et suffisamment de possibilités de faire le tri sélectif des déchets avant qu’ils ne soient traités. Nous travaillons pour ce faire avec une organisation partenaire qui surveille tout cela, en kilogrammes de CO2 par type de fraction de déchets. Nous avons également des facteurs de conversion basés sur notre objectif de neutralité carbone d’ici 2035. Nous avons aussi prévu une presse qui comprime autant que possible les déchets et réduit les coûts de transport au minimum.
Tout le monde parle de l’IoT (Internet des objets). Qu’est-ce que cela signifie et comment cela se traduit-il sur Loop5 ?
ROBBE: D’une part, il y a l’application Campus qui contrôle tous les accès au site, tant à la zone de mobilité qu’à l’intérieur de l’ensemble des bâtiments. Les deux autres systèmes avancés sur le site sont le système de gestion du bâtiment (BMS) dont nous avons parlé plus tôt et le système de gestion de l’énergie (EMS). Actuellement, celui-ci surveille principalement la quantité d’eau et le nombre de kilowattheures d’électricité consommés. Avec Limoengroen, nous documentons et assurons ainsi le suivi du chauffage et du refroidissement.
JEROEN: Le système EMS assure un suivi permanent, sur lequel nous nous basons pour facturer les locataires, vérifier la consommation et calculer nos émissions de CO2, par exemple. Le système de gestion du bâtiment est surtout très technique et axé sur la supervision. Nous utilisons également l’IA pour faire des prédictions constantes.
L’application Campus est liée à tout cela. Par exemple, si vous réservez une salle de réunion partagée, elle peut être refroidie ou chauffée à l’avance. Donc, là aussi, c’est une combinaison de surveillance de l’énergie et de gestion des bâtiments. Le contrôle d’accès et la gestion des réservations sont le premier objectif, mais on trouve un élément de gestion énergétique en arrière-plan. Notre équipe IT travaille d’arrache-pied pour rassembler toutes les données disponibles sur Loop5 afin que nous puissions constamment vérifier si tout se passe bien sur le site : la fluidité du trafic dans le parking, le bon fonctionnement d’Internet partout, l’activation de tous les verrous en ligne, etc. Avec l’IoT, notre objectif est d’anticiper les pannes ou les désagréments éventuels.